Chaque jour, une poésie d'auteurs connus ou d'autres injustement oubliés.
Ce jour-là, quand je t'ai vue, j'étais comme quand on regarde le soleil ; j'avais un grand feu dans la tête, je ne savais plus ce que je faisais, j'allais tout de travers comme quelqu'un qui a trop bu, et mes mains tremblaient. Je suis allé tout seul...
pur LA FILEUSE Assise, la fileuse au bleu de la croisée Où le jardin mélodieux se dodeline ; Le rouet ancien qui ronfle l'a grisée. Lasse, ayant bu l'azur, de filer la câline Chevelure, à ses doigts si faibles évasive, Elle songe, et sa tête petite s'incline....
LA MORT DES AMANTS Nous aurons des lits pleins d'odeurs légères, Des divans profonds comme des tombeaux, Et d'étranges fleurs sur des étagères, Ecloses pour nous sous des cieux plus beaux. Usant à l'envi leurs chaleurs dernières, Nos deux cœurs seront...
EPILOGUE Voilà ce que chantait aux Naïades prochaines Ma Muse jeune et fraîche, amante des fontaines, Assise au fond d'un antre aux Nymphes consacré, D'acanthe et d'aubépine et de lierre entouré. L'Amour, qui l'écoutait caché dans le feuillage, Sortit,...
L'ETRANGER Etranger, ne te rendors pas, Ce n'est pas encor le retour. Ne t'attache pas à ces choses, Ne demeure pas devant elles. Ne laisse pas les souvenirs Monter en eau à tes paupières. Cette fleur, ne la cueille point, Ne prolonge pas ce baiser, Ne...
MAIS CES OISEAUX... Mais ces oiseaux qui volaient haut dans le soir, En chantant malgré le vent et malgré l'ombre, Disaient-ils point, ah, si fiers en ce décombre ! L'inexorable dureté de l'espoir. La peur entrait dans la bête et dans la plante, Les angoisses...
A Georges Auric. Il se peut qu'un rêve étrange Vous ait occupée ce soir, Vous avez cru voir un ange Et c'était votre miroir. Dans sa fuite Eléonore A défait ses longs cheveux Pour dérober à l'aurore Le doux objet de mes voeux. A quelque mari fidèle Il...
LE MATIN L'Aurore sur le front du jour Sème l'azur, l'or et l'ivoire, Et le Soleil, lassé de boire, Commence son oblique tour. Ses chevaux, au sortir de l'onde, De flamme et de clarté couverts, La bouche et les naseaux ouverts, Ronflent la lumière du...
C'EST AUJOURD'HUI 8 juillet 1894 Dimanche, Sainte Virginie C'est aujourd'hui la fête de Virginie... Tu étais nue sous ta robe de mousseline. Tu mangeais de gros fruits au goût de Mozambique et la mer salée couvrait les crabes creux et gris. Ta chair était...
(extrait) A Albert Loranquin Ce vin dont nous aimions l'amère odeur d'orage, Ce pain plus flamboyant qu'une étoile au soleil Et, sur la table offerte aux grappes du réveil, La blancheur d'un bras nu sculptant son paysage, - Mer et ciel, à midi, se disputent...
NUEE Comme si rien n'était solide, comme si Je marchais sur un trou, comme si leurs corps denses Allaient se diluer en poussière de nuit... Mon geste vain s'ouvre et se ferme sur des formes Qu'en plein jour le soir mange et mes yeux qui s'endorment Ne...
LA NUIT Elle est venue la nuit de plus loin que la nuit A pas de vent de loup de fougère et de menthe Voleuse de parfum impure fausse nuit Fille aux cheveux d'écume issus de l'eau dormante Après l'aube la nuit tisseuse de chansons S'endort d'un songe...
OMBRE DES AMES Morts qui vous éloignez, je cherche en vain les traces D'une vie où l'amour aussi vif que fugace Brûla d'un feu perdu dont on cèle les cendres. Comment vous recréer, vous parler, vous entendre ? Vous ne nous laissez rien. Un mur dont les...
A LA GORGE Comme un alcool de neige à la gorge des nuits L'herbe folle des songes pousse au travers du coeur Des eaux couchées en rond dans le lit des guenons Des eaux longues de l'âge à la fleur de ma rage Il s'élève ô tortue lente et froide et si lente...
PARLER SEUL Il arrive que pour soi l'on prononce quelques mots seul sur cette étrange terre alors la fleurette blanche le caillou semblable à tous ceux du passé la brindille de chaume se trouvent réunis au pied de la barrière que l'on ouvre avec lenteur...
SONNET Je sais faire des vers perpétuels. Les hommes Sont ravis à ma voix qui dit la vérité. La suprême raison dont j'ai, fier, hérité Ne se payerait pas avec toutes les sommes. J'ai tout touché : le feu, les femmes, et les pommes ; J'ai tout senti :...
Et je m'étais fait une vie Si digne d'amour ou d'envie, Une vie à décourager Tout coeur qui lutte ou dissimule, Tout adversaire ou tout émule, Cerveau pensif au coeur léger. Maintenant ma vie est en cendres. Ses trois merveilles les plus tendres Ont flambé...
SANG Dans mes veines ce n'est pas du sang qui coule, c'est l'eau, l'eau amère des océans houleux... Des bonaces, des jours pleins gonflent ma poitrine, préludes aux blancs vertiges des ouragans... Des poulpes étirent la soie crissante de leurs doigts...
INVOCATION A LA LUNE Ainsi qu'une jeune beauté Silencieuse et solitaire, Des flancs du nuage argenté La lune sort avec mystère. Fille aimable du ciel, à pas lents et sans bruit, Tu glisses dans le airs où brille ta couronne, Et ton passage s'environne...
Elle est retrouvée ! Quoi ? l'éternité. C'est la mer mêlée Au soleil. Mon âme éternelle, Observe ton voeu Malgré la nuit seule Et le jour en feu. Donc tu te dégages Des humains suffrages, Des communs élans ! Tu voles selon... - Jamais l'espérance. Pas...
BIFURCATION je ne veux pas te quitter mon sourire est attaché à ton corps et le baiser de l'algue à la pierre à l'intérieur de mon âge je porte un enfant gai et bruyant il n'y a que toi qui saches le faire sortir du coquillage comme l'escargot avec de...
L'INVITATION AU VOYAGE Mon enfant, ma soeur, Songe à la douceur D'aller là-bas vivre ensemble ! Aimer à loisir, Aimer et mourir Au pays qui te ressemble ! Les soleils mouillés De ces ciels brouillés Pour mon esprit ont les charmes Si mystérieux De tes...
LA CAPITALE L'énorme capitale est un fruit douloureux. Son écorce effondrée et ses pulpes trop mûres Teignent opulemment leurs riches pourritures D'ors verts, de violets, et de roux phosphorescents Lâchant un jus épais, douceâtre et cancéreux, Ses spongieuses...
LE BAIN DU ROI Rampant d'argent sur le champ de sinople, dragon Fluide, au soleil la Vistule se boursoufle. Or le roi de Pologne, ancien roi d'Aragon Se hâte vers son bain, très nu, puissant maroufle. Les pairs étaient douzaine : il est sans parangon....
LE CHAT BORGNE La femme est aux varechs, l'homme est à la Guyane Et la petite maison est seule tout le jour. Seule ? Mais à travers les persiennes vertes, on voit luire dans l'ombre comme une goutte de mer. Quand le bagne est à l'homme, la mer est à la...